dimanche 23 octobre 2011

Rentrée littéraire 2 - l'indépendant et le salarié

Le loup et le chien.

Un Loup n'avait que les os et la peau ;
Tant les Chiens faisaient bonne garde.
Ce Loup rencontre un Dogue aussi puissant que beau,
Gras, poli, qui s'était fourvoyé par mégarde.
L'attaque, le mettre en quartiers
Sire Loup l'eût fait volontiers.
Mais il fallait livrer bataille
Et le Mâtin était de taille
A se défendre hardiment.
Le Loup donc l'aborde humblement,
Entre en propos, et lui fait compliment
Sur son embonpoint qu'il admire.
Il ne tiendra qu'à vous, beau sire,
D'être aussi gras que moi, lui repartit le Chier.
Quittez les bois, vous ferez bien !
Vos pareils y sont misérables,
Cancres, haires, et pauvres diables,
Dont la condition est de mourir de faim.
Car quoi ? Rien d'assuré, poing de franche lippée,
Tout à la pointe de l'épée,
Suives-moi ; vous aurez un bien meilleur destin.

Le Loup reprit : Que me faudra-t-il faire ?
Presque rien, dit le Chien : donner la chasse aux gens
Portants bâtons, et mendiants ;
Flatter ceux du logis, à son maître complaire ;
Moyennant quoi votre salaire
Sera force reliefs de toutes les façons :
Os de poulets, os de pigeons,
Sans parler de mainte caresse.
Le loup déjà se forge une félicité
Qui le fait pleurer de tendresse.
Chemin faisant il vit le col du Chien, pelé :
Qu'est-ce là ? lui dit-il. Rien. Quoi ? rien ? Peu de chose.
Mais encor ? Le collier dont je suis attaché
De ce que vous voyez est peut-être la cause.
Attaché ? dit le Loup : vous ne courez donc pas
Où vous voulez ? Pas toujours, mais qu'importe ?
Il importe si bien, que de tous vos repas
Je ne veux en aucune sorte,
Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.
Cela dit, maître Loup s'enfuit, et court encor.

Jean de La Fontaine (Fables, Livre I, 5)

mardi 11 octobre 2011

Consultants RH et en recrutement - un documentaire choc

Le 6 octobre dernier, Antenne 2 a diffusé "La gueule de l'emploi", un excellent documentaire sur le processus de recrutement de commerciaux d'une grande compagnie d'assurance. Les deux journées ont été filmées ainsi que le debriefing de quelques participants.

Ce film est intéressant à plus d'un titre : il montre en situation comment réagissent les membres du jury, les consultants d'un cabinet de search et les candidats. D'un point de vue sociologique, il illustre le décalage entre la perception du monde du travail des candidats et les besoins exprimés par l'entreprise. Et les commentaires dans la presse ou sur le web accentuent encore l'expression de cet écart.

Les consultants qui interviennent sont de bons professionnels, leurs méthodes apparaissent extrêmement rudes, mais somme toute répondent bien aux attentes de leur client. Mais en termes d'image de marque vis à vis de l'extérieur...
Qui est responsable de tout cela ? Le consultant, le client ? Et le consommateur, ne doit-il pas se sentir également concerné ? Et tous ne pas oublier qu'un jour ils pourraient bien se retrouver dans la position de candidat !

jeudi 6 octobre 2011

Rentrée littéraire 1 - le travail des seniors

Avant la saison des prix littéraires, nous commençons une petite série de chroniques consacrée à ce que peuvent nous dire les grands écrivains sur des sujets économiques et sociaux.

En cette "Année Céline", commençons par un extrait "D'un château l'autre" où Louis-Ferdinand raconte son "retour à l'emploi" à plus de 60 ans.
Il vous suffit pour actualiser par remplacer "médecin" par "consultant"...

« Pour parler franc, là entre nous, je finis encore plus mal que j’ai commencé.... […] y a l’âge, vous me direz…y a l’âge, vous me direz… y a l’âge !... c’est entendu !... à 63 ans et mèche, il devient extrêmement ardu de se refaire une situation… de se relancer en clientèle… ci ou là !.... Je vous oubliai, je suis médecin… la clientèle médicale, de vous à moi, confidentiellement, est pas seulement affaire de science et de conscience… mais avant tout, par-dessus tout, de charme personnel… le charme personnel passé 60 ans ?... [...] Ecoutez un peu les clientes, au grès des trottoirs, des boutiques… il est question d’un jeune confrère… « oh, vous savez, Madame !... Madame !... quels yeux ! quels yeux ce docteur ! il a compris tout de suite mon cas !..."