mercredi 27 janvier 2010

PME et Grands Comptes : cannibalisées, lièvres, mutualisées ou solidaires ?

La réduction drastique du nombre de leurs fournisseurs de services par les Directions des Achats des Grands Comptes profite aux grandes structures - Cabinets de Conseil et SSII - qui peuvent négocier des volumes de prestations plus ou moins récurrents, aux dépends des PME/TPE qui ont de moins en moins la possibilité de se faire référencer et se voient fermer progressivement le marché des grands donneurs d'ordres.
Cette tendance à privilégier la réduction des coûts à la qualité des prestations est adaptée à l'achat de "produits" de masse plus que de compétences ciblées. Mais comme la réussite des projets repose de plus en plus sur des experts pointus, les opérationnels des Grands Comptes - c'est à dire les clients directs - restent demandeurs de ressources dont disposent bon nombre de PME/TPE qui, paradoxalement, ne peuvent plus prester pour eux "en direct" faute de référencement. En dehors de quelques possibilités d'interventions très ponctuelles en gré à gré dans certains secteurs d'activités, elles disposent de quatre modèles de contournement pour prester auprès de Grands Comptes : le cannibalisme, le lièvre, la mutualisation et la solidarité.

1) Le cannibalisme est la conséquence des contrats de portage (10% à 15% de la facture client pour rémunérer un "service" administratif sans aucune autre valeur ajoutée) et de sous-traitance (au minimum 20% et plus généralement 30-35% de marge) auprès d'une grande société référencée. Avec de surcroît la perte d'une partie des prérogatives de management, de suivi opérationnel et administratif des collaborateurs et donc les risques inhérents de délit de marchandage et prêt illicite de main d'oeuvre... Et en prime de servir de variable d'ajustement de l'effectif des grandes structures !

2) Les TPE/PME peuvent essayer de convaincre, mais c'est assez rare, la Direction des Achats de les référencer pour servir de lièvre aux grandes sociétés en termes de compétences, de pertinence et de qualité de service.

3) D'autres envisagent des solutions de mutualisation avec la création de GIE (Groupements d'Intérêts Économiques). Cependant, leur mise en œuvre exige de respecter des contraintes inhérentes à la création et à la gestion d'une nouvelle structure juridique, et surtout une juste gouvernance qui respecte les intérêts de tous les membres. Mais quid de l'homogénéité des ressources et de la garantie de qualité des compétences et de leur management ?

4) Je rencontre beaucoup de dirigeants de petites structures qui se préparent actuellement à l'après-crise en réfléchissant, dans un esprit de solidarité, à la création de réseaux d'entreprises autour d'une marque commune et pouvant aller jusqu'à des liens capitalistiques croisés. Appartenir à un bon réseau permet d'accroître les surfaces financières, de mutualiser une partie des ressources commerciales, de partager des moyens logistiques et administratifs, de disposer d'un vivier de collaborateurs et de compétences... toutes sortes de bonnes choses qui allèchent les babines des Directeurs des Achats ! Ceux-ci peuvent dès lors se poser la question d'un arbitrage désormais pertinent entre les grandes sociétés et des organisations crédibles qui disposent de la taille critique pour satisfaire sinon la totalité, du moins une partie non négligeable de leurs besoins.
Ces initiatives doivent être étudiées avec attention. Les réseaux qui fonctionnent bien respectent le plus souvent quelques règles de bon sens : se constituer autour d'une société "mère" qui dispose déjà d'un peu d'expérience et de légitimité, s'inspirer de valeurs communes, partager des locaux pour mieux travailler et communiquer ensemble, respecter à la fois l'autonomie des membres et une coordination étroite notamment dans la conduite des actions commerciales, et surtout éviter les "cascades de marges" entre les sociétés !

Benoît Duchange (26 janvier 2010)






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